Lutter contre le décrochage scolaire : oui mais…

Jan 09

Lutter contre le décrochage scolaire : oui mais…

Vincent Peillon veut tenter de « raccrocher » cette année 25.000 jeunes qui quittent le système scolaire sans qualification. En un an, 23.000 jeunes ont repris des études, 20.000 en formation initiale et 3.000 en service civique.

L’objectif du ministre de l’éducation, dicté par François Hollande est de diviser par deux le nombre de décrocheurs pendant le quinquennat. Actuellement 140.000 jeunes quittent chaque année le système scolaire sans diplôme.

Quelles sont les solutions proposées par Vincent Peillon ?

Pour lutter contre ce décrochage scolaire, Vincent Peillon propose 5 solutions :

  1. Le service civique
    Ce service permettrait aux décrocheurs d’acquérir une expérience dans le monde associatif. Il est prévu de réservé 5.000 missions pour ces jeunes.
  2. Le retour des jeunes vers une formation classique
    360 plateformes de suivi identifient ceux qui sont prêts à retourner à l’école. Ainsi 20.000 jeunes ont repris un cursus normal et 880 ont signé un contrat d’apprentissage.
  3. Les établissements de la seconde chance
    Les écoles de la seconde chance et les micro-lycées proposent aux jeunes le réapprentissage des fondamentaux. 2.600 jeunes ont ainsi trouvé un solution.
  4. La Mission de lutte contre le décrochage
    Cette mission est prévue pour ceux qui ne sont pas prêts à retourner dans un établissement classique et propose un accompagnement personnalisé.
  5. Le travail en amont
    Il faut réformer les programmes scolaires et l’éducation prioritaire. Le système doit être revu pour encourager et non punir. Il faut prévenir l’absentéisme.

Est-ce réaliste ?

Si l’on compare le nombre de jeunes (140.000) qui quittent le système sans diplôme (ni bac) avec les différentes solutions proposées qui devrait leur permettre de réintégrer leur cursus, on se rend bien compte que pour un grand nombre d’entre eux aucune solution n’est envisagée. Mais que dire de ceux qui « sont pris en charge » ? Quelle formation et quel diplôme vont-ils obtenir ? Ont-ils plus de chances de ne pas se retrouver au chômage ?

La seule vraie solution, à mon sens, serait la dernière proposition « travailler en amont pour lutter contre le décrochage ». Il ne faut pas attendre que les élèves aient décroché pour réagir. Revoir les programmes scolaires, c’est très bien, mais encore faut-il s’en donner les moyens.

Une culture du diplôme

Les professeurs se plaignent souvent des programmes qu’ils ne peuvent pas terminer. Les raisons paraissent pourtant assez claires. Les programmes ne sont pas nécessairement plus denses qu’il y a vingt ans et plus, mais les méthodes ont changé, les élèves ont changé, l’environnement a changé. Et l’éducation n’est pas adaptée. L’enfant ne sait plus ce qu’est le respect, la discipline et l’effort pour bien apprendre. Il y a cinquante et plus, il était possible de faire classe à cinquante élèves disciplinés, aujourd’hui c’est devenu mission impossible. Le respect, l’écoute, l’attention sont trop souvent source d’incompréhension et de conflit. Faire classe à trente élèves d’un niveau hétérogène est quasi impossible. Seul sur l’ensemble du groupe, un petit nombre s’en sortira, même avec un niveau qui diminue puisque l’on procède de plus en plus à un nivellement des programmes par le bas. La moyenne de la classe obtiendra vaille que vaille une petite qualification. Mais il en restera une dizaine dont on ne saura que faire, et dont on n’aura pas vraiment le temps de s’occuper.

Il y a cinquante ans, tous les élèves n’entraient pas au collège. Il existait des solutions d’orientation bien plus simples même si elles étaient modestes. Il existait les filières longues et les filières courtes. L’apprentissage professionnel était plus présent et beaucoup sortaient de l’école avec un métier en poche.

Aujourd’hui, c’est avec un diplôme que l’on termine sa scolarité, diplôme souvent synonyme de bulletin d’inscription à Pole Emploi. Tous ces jeunes qui vont obtenir un diplôme ou un pseudo-bac, auront-ils pour autant un emploi, c’est moins sûr. Même si le diplôme semble être une arme contre le chômage (article du 11 décembre), lorsqu’on est « trop diplômé » (bac+5 et plus) ce n’est pas plus facile de trouver un emploi ; il devient même impossible d’occuper un emploi inférieur à ses compétences, les employeurs étant dans l’obligation de rémunérer les emplois en fonction du niveau d’étude. Il existe donc encore trop de freins qui pénalisent le système.

A vouloir 80% d’une tranche d’âge au niveau bac, n’allons-nous pas en l’encontre des réels besoins du marché. Comme on le signalait il y a quelque temps à propos du système suisse qui valorise l’apprentissage, les jeunes suisses se moquent des français qui obtiennent bien des diplômes mais pas de travail.

Refondation

Penser au décrochage, c’est bien, mais si l’on veut parler de refondation, il faut se préoccuper de tous les niveaux de l’éducation et de l’instruction. L’illettrisme n’est-il pas un autre fléau ? Pour une vraie refondation, il est nécessaire de tout remettre à plat et ne pas se contenter de faire quelques saupoudrages qui, en définitive, ne satisferont personne. D’autres pays tel le Québec ont déjà mis en place une politique dynamique et efficace pour résoudre le problème du décrochage scolaire, peut-être serait-il intéressant de voir ailleurs et prendre exemple sur les pays qui sont parvenus à endiguer ce fléau ?

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