Pendant trois jours, Doha, la capitale du Qatar organise le WISE (World innovation summit for Education). Les spécialistes mondiaux de l’éducation sont réunis, durant cette 5e édition du Wise, pour échanger sur les bonnes pratiques ou les nouvelles tendances.
Un millier de personnes sont réunies pour cet événement créé par la Qatar Foundation. Notre ministre de l’éducation, Vincent Peillon, est absent de ce sommet. Il n’a pas participé l’an dernier, car la préparation de la refondation pour l’école l’avait trop accaparé ; précisons que son prédécesseur Luc Chatel était bien présent en 2011.
Le thème de cette année est « reinventing Education for life » (réinventer l’éducation pour la vie). Les participants s’interrogent sur la pertinence des modes d’éducation face aux besoins des populations, les compétences indispensables pour tous (sciences, technologies, ingénierie, mathématiques) ou l’enseignement sans professeurs (avec les Moocs).
Chaque année, un prix est décerné. L’an dernier, il avait été attribué à l’indien Madhav Chavan pour sa nouvelle méthode d’apprentissage de la lecture ; il a alors reçu une récompense de 500 000 dollars. Cette année, la lauréate est la colombienne Vicky Colbert.
Vicky Colbert
Mme Vicky Colbert a reçu le prix 2013 WISE pour l’éducation.
Mme Vicky Colbert est une fille d’enseignante. Elle a co-créé la fondation Escuela nueva, une ONG qui a révolutionné l’école en Colombie.
En 1975, à une époque où la Colombie était plutôt connue pour ces conflits idéologiques et sa violence politique, Mme Vicky Colbert a entrepris de mener sa propre révolution tranquille. Convaincue que, sans éducation de base pour tous, rien ne pouvait être atteint, elle a transformé la vie des gens ordinaires de la campagne colombienne en leur permettant d’accéder à l’éducation.
L’Escuela nova a débuté avec une équipe d’enseignants expérimentés, afin de maximiser l’impact de l’éducation sur le terrain et au plus haut niveau. L’idée fondatrice était de placer les enfants au cœur du processus d’apprentissage, les enseignants devenant des animateurs, en collaboration avec les associations, les familles, les établissements de recherche et les décideurs politiques. Cet apprentissage s’inspire des travaux de Maria Montessori, Ovide Decroly ou Célestin Freinet. L’organisation de la classe en petits groupes a permis aux enfants de milieux défavorisés ou de milieux ruraux de suivre une scolarité réussie.
Ce modèle pédagogique unique est devenu une politique nationale en Colombie dans les années 1980 et a été reproduit dans diverses régions du pays. Ce modèle a été reconnu comme l’une des réformes de politique publique les plus réussies.
Aujourd’hui, Escuela nueva a été mis en place dans toute l’Amérique latine et aux Caraïbes, ainsi qu’au Timor oriental et au Vietnam. Ce sont plus de cinq millions d’enfants qui sont pris en charge dans le monde entier.
Cet apprentissage coopératif et personnalisé, adopté par une vingtaine de pays, permet aussi de développer le civisme, la convivialité et la confiance en soi.
Une opération de communication
L’épouse du chef de l’Etat, l’altesse Sheikha Moza bint Nasser, qui préside la Qatar Foundation, est à l’origine de la création du WISE. Le sommet constitue également une efficace opération de communication pour ce petit état à l’économie florissante. « Nous souhaitons passer d’une économie fondée sur le pétrole à une économie fondée sur la connaissance », expliquait Abdulla Bin Ali Al-Thani, président de Wise. L’économie du Qatar est principalement dirigée par des cadres étrangers, et le pays s’oriente vers la formation de cadres autochtones. C’est ainsi que le campus Education city accueille des universités du monde entier, dont HEC. L’objectif est d’accueillir un qatari pour trois étrangers. Le président de Wise précisait également « Notre avenir dépendra de la façon dont nos jeunes seront éduqués ».