La charte de la laïcité vient d’être adoptée dans les écoles françaises, mais un projet de Charte des valeurs québecoises divise enseignants et gouvernement. La Fédération autonome de l’enseignement (FAE) considère qu’il est normal qu’une enseignante porte la kippa, la croix ou le hidjab.
La FAE, qui représente un tiers des enseignants, défend une laïcité dite ouverte. Elle a déclaré qu’elle usera de tous les recours pour défendre le droit de ses membres de porter des signes religieux. Le président de la FAE estime que l’Etat ne doit pas interdire le port de vêtements ou d’accessoires à connotation religieuse. « Peut-on convertir les élèves du simple fait de porter une croix dans le cou ? On pense que non. ». L’interdiction de porter un signe religieux ne garantit pas la laïcité de l’Etat.
Laïcité
Au-delà du problème des signes extérieurs, une question sémantique est en cause. Il y a un an, la réflexion portait sur un projet de « Charte de la laïcité », et le gouvernement l’a transformé en « Charte des valeurs québecoises » ce que rejette la FAE.
L’inquiétude pour la FAE est le risque de dérapages en parlant de « valeurs » et permettrait à des individus de tenir des discours d’intolérance. La laïcité ne se limite pas aux signes religieux ostensibles, elle fait référence à l’histoire d’une nation.
La FAE laisse entendre que le gouvernement s’est contenté d’importer un modèle de laïcité. Le Québec est une terre d’accueil et se doit d’accepter certaines manifestations, tout en conservant les traditions et les spécificités culturelles.
Des limites à ne pas franchir
Bien que la FAE soit attachée au maintien des signes religieux ostensibles pour les personnes, des règles doivent être strictes quant à une certaine « laïcité » des établissements. Toute demande de transformation d’un local pour en faire un lieu de prière doit être refusé. Toute demande d’exemption ou d’adaptation d’un cours pour des motifs religieux doit être refusée. Les congés religieux doivent être négociés de façon que tous les enseignants, pratiquants croyants ou non, aient les mêmes privilèges. Le gouvernement devra prendre les mesures pour que ce ne soient pas les enseignants qui assument ces difficultés.
La FAE demande également que le gouvernement poursuive la « laïcisation » de ses institutions, en particulier en abolissant le Comité des affaires religieuses, qui conseille le gouvernement sur la place de la religion dans les écoles.
Quel est l’avenir du projet ?
Il semble, en l’état, que le projet soit voué à l’échec. Le professeur de droit à l’Université d’Ottawa Sébastien Grammond estime que l’on peut être neutre et « s’accommoder de signes religieux ». Il affirme également que « la pièce maîtresse de ce texte, qui est l’interdiction des signes religieux ostentatoires pour les employés de l’État dans l’exercice de leurs fonctions, ‘’est une atteinte à la liberté de religion’’ ».
En ce qui concerne la loi internationale, M. Grammond explique que le Canada et le Québec sont signataires du Pacte international sur les droits civils et politiques, auquel le gouvernement du Québec doit se conformer.
Il cite l’exemple de la France qui a été condamnée par une commission de l’ONU, il y a près d’un an, pour avoir refusé à un élève sikh de porter le turban dans une école.
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