Finie la dictée sanction, place à l’évaluation positive de l’orthographe

Avr 10

Finie la dictée sanction, place à l’évaluation positive de l’orthographe

Le nouveau ministre de l’éducation souhaite mettre en place un nouveau barème afin d’améliorer le niveau en orthographe des élèves. Ce barème ne serait plus censé sanctionner mais plutôt récompenser.

L’ « évaluation positive » répond aux engagements pris dans la loi du 8 juillet 2013 sur la refondation de l’école.

 

Quel est l’objectif de la notation positive ?

Le but est de ne pas décourager les élèves, comme le faisait l’ancien barème où 5 fautes étaient sanctionnées par un zéro.

Un exemple de ce système de pédagogie dite « de la réussite ».

Prenons le cas d’une dictée qui comporte 64 mots. Les fautes « graves » sont sanctionnées classiquement par un retrait de 4 points. Ainsi, que l’élève ait 5 fautes ou 15 fautes, il obtiendra la même note, c’est-à-dire O.

Dans la notation positive, on compte le nombre de mots justes au lieu de compter les fautes (ou les erreurs pourraient dire certains), ce qui permettrait d’obtenir :

  • Pour 40 mots justes (ou 24 fautes) : 40 / 64 % = 62,5 % de réussite
  • Ou pour 54 mots justes (ou 10 fautes) : 54 / 64 % = 84,37 % de réussite
  • Ou encore pour 59 mots (soit 5 fautes) : 59 / 64 % = 92,18 % de réussite

Par extension, on s’aperçoit qu’il n’y a plus de « nuls » en orthographe. Et pourtant la Dictée pour les nuls, chère à Jean-Joseph Julaud, s’était bien déroulée le 22 mars dernier ! En appliquant un même principe à d’autres domaines, plus personne ne pourrait voir son permis de conduire retiré puisqu’il serait extrêmement peu envisageable de se faire retirer 12 points en une seule fois ; ainsi en comptant les bonnes façons de conduire, le comportement des automobilistes serait alors plus positif (!).

Les élèves qui seront évalués selon ce mode d’observation seront-ils meilleurs pour autant ? On veut le leur faire croire. Mais les bons élèves dans tout cela, sont-ils valorisés ? Ne vont-ils pas régresser afin que l’on s’occupe d’eux. N’oublions pas que les très bons comme les moins bons, lorsqu’ils arriveront sur le marché du travail, ils seront plus lourdement sanctionnés. Lorsqu’un CV va arriver sur le bureau d’un recruteur, on ne comptera pas les mots justes, mais on verra immédiatement les erreurs qui sauteront aux yeux.

Les mauvais résultats en dictée sont-ils vraiment le problème ?

Ne faut-il pas chercher les causes ailleurs ? Qu’est-ce que la dictée ? Ou tout autre écrit personnel ?

Une phrase, un texte, ce n’est pas une succession de mots que l’on met les uns au bout des autres. A commencer par les mots eux-mêmes, parlons de l’orthographe lexicale. Pour pouvoir écrire un mot correctement, il faut au moins l’avoir vu une fois écrit, puis ensuite le réécrire afin de l’entrer dans sa mémoire. Ajoutons qu’il est possible, très souvent de faire appel à l’étymologie et au sens pour bien l’orthographier. Deuxième niveau de l’écriture, l’orthographe grammaticale. Il est indispensable de comprendre comment les mots sont liés les uns aux autres. Il faut alors faire appel aux notions de grammaire ou de conjugaison, même si parfois elles sont complexes. Ainsi, avant de s’attaquer au problème de la dictée, intéressons-nous de plus près aux fondements de la langue Quand on parle de refondation, revenons aux priorités que sont l’apprentissage de la grammaire, de la conjugaison ou des notions basiques de l’orthographe. Le BLED, pour ne citer que lui, a souvent été décrié voire même interdit d’utilisation. Pourtant, bon nombre s’en souviennent, et pas toujours à regret. La répétition des exercices a fini par imprimer les notions essentielles dans des millions de petits cerveaux ! On pourrait dire la même chose des tables que l’on a apprises et qui nous ont permis de faire n’importe quelle opération. Aujourd’hui, la facilité passe par les tablettes ou les ordinateurs, mais si ces machines sont en panne, combien se trouvent démunis et incapables d’écrire ou de compter !

Et les auto-dictées dans tout cela. Une dictée, ce n’est pas non plus un texte littéraire arbitraire qui va être proposé. Une vraie bonne dictée est une composition qui résulte de tout un travail de préparation en amont dans les divers registres de la langue.

Modifier les modes de correction, valoriser les progrès, encourager, c’est très bien. Mais attention de ne pas créer de fausses illusions. Réformer la dictée, oui, mais, encourager en priorité l’envie de travailler, l’envie de réussir, et cela passe également par l’encouragement des professeurs.

Pour conclure, on peut être surpris de cette « nouveauté » et beaucoup d’enseignants doivent l’être également. Bon nombre d’entre eux pratiquent la notation positive depuis plus de 20 ans.

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